New York et la société américaine – Le vieux New-York

 

 

I. — Le vieux New-York. — Le quartier des affaires. — Les journaux.

 

 

Il existe un plan curieux de New-York dressé cinquante-quatre ans après l’occupation anglaise, en 1728. Un remarquable fac-similé en a été récemment obtenu par des procédés héliographiques, et l’on peut le voir suspendu aux vitrines des principaux libraires de la grande cité commerçante. D’un côté sont gravées les armes de « son excellence John Montgomerie, capitaine-général et gouverneur en chef des provinces de sa majesté, New-York, New-Jersey, etc. » C’est un descendant des compagnons de Guillaume de Normandie, comme l’indique la devise française : garde bien, qui se déroule dans un cartouche au bas de son écu. De l’autre côté du plan sont les armes parlantes de New-York. Le champ est découpé, par les quatre ailes d’un moulin à vent posées d’écharpe, en quatre compartiments égaux dont deux barils de farine occupent ceux de droite et de gauche, et deux castors passants ceux d’en haut et d’en bas. L’écu est flanqué d’un matelot hollandais tenant la sonde, en souvenir de la découverte de l’Hudson, et d’un aborigène, un Mohican muni de son arc. Ces armes de New-York ont été religieusement conservées ; le sceau de la municipalité n’en a jamais eu d’autres.

Sur ce vieux plan, la ville occupe déjà toute la pointe de l’île de Manhattan. On y voit un dédale de rues se croisant d’une façon irrégulière, et portant pour la plupart les noms qu’elles ont encore ; les dénominations royalistes ont seules été changées plus tard, à la suite de la révolution américaine. Un fort au bord de l’eau commande l’extrémité de la pointe, mais les murailles et les fossés des Hollandais ont disparu ; une rue, Wall-street, les rappelle et en marque une des directions. Sur un monticule, à l’extrémité opposée à la pointe de l’île, un moulin à vent ; au-delà, « la ferme du roi », puis des terrains vagues, des eaux stagnantes, une prairie, nettement indiqués par le dessin et bordant « la grande route de Boston. » Sur les bords des deux rivières qui baignent l’île de Manhattan, l’Hudson ou rivière du Nord et la rivière de l’Est, sont tracés les quais, les entrepôts, les cours, les jetées, les chantiers maritimes, — keys, docks, yards, wharves, slips, — avec les noms respectifs des négociants auxquels ils appartiennent. La ville, qui contenait alors 8 000 habitants, est divisée en six wards ou quartiers. On n’y compte pas moins de dix églises, y compris les deux des Hollandais, la synagogue des juifs et « l’église française; » le reste appartient aux diverses sectes réformées, baptistes, quakers, presbytériens, luthériens. Partant de la place de la Parade, du pied du fort où est « la chapelle du roi, la maison du gouverneur et l’office de la secrétairerie », se détache une grande artère, Broadway, la « rue large » ; elle vient mourir en une longue allée d’arbres, dans les terres qui marquent au nord-est la limite de la ville. Tout cela est soigneusement reporté sur le plan, dont le dessin, exécuté d’un burin à la fois élégant, correct et léger, nous peint d’une manière saisissante la cité de New-York telle qu’elle était il y a moins de cent cinquante ans.

Le fort, où vivait le gouverneur, où étaient installés les bureaux de la province, se nomme aujourd’hui Castle-Garden; il a été entièrement transformé, et ne sert plus qu’à des usages pacifiques. C’est là que débarquent depuis 1855 et chaque jour en si grand nombre, souvent plus de mille à la fois, les pauvres émigrants qui viennent de tous les points du globe demander aux États-Unis la liberté, l’indépendance et le bien-être que le sol natal leur refuse. Le château a vue sur l’Hudson. Il est entouré d’un jardin semé d’arbustes et de fleurs ; tout à côté un quai superbe, couronné de blocs de granit. Sur l’immense rade, fermée, défendue comme un lac et aux eaux toujours calmes, des centaines de bateaux vont et viennent, au milieu desquels, couronnés d’un panache de fumée et faisant à chaque seconde entendre le bruit strident de leur sifflet, les bacs à vapeur ou ferries qui relient les deux rives de l’Hudson et de la rivière de l’Est. On ne saurait offrir à l’arrivant un plus magique spectacle, ni mieux accueillir l’étranger.

Remontons la grande rue qui s’ouvre devant nous. La foule des voitures, des omnibus, des charrettes, qui se heurtent de tous côtés, rend la chaussée inabordable au piéton. Il a peine à se frayer un chemin le long des trottoirs, et nulle ville au monde, pas même Londres avec sa Cité si affairée, si bruyante, ne peut le disputer à Broadway de New-York pour le mouvement et l’animation. Aucune dame dans cette foule pressée. Cela dure pendant huit heures continues, sans une minute de répit, de neuf heures du matin à cinq heures du soir, sur plus de quatre kilomètres, de la Batterie à Union-Square, c’est-à-dire sur une longueur presque égale à celle des boulevards de Paris, de la Madeleine à la Bastille. A Union-Square, Broadway n’est qu’à son milieu ; mais le quartier des affaires finit et la ville commence à être plus calme. Quelques-unes des rues latérales offrent le même encombrement. Le bruit ne cesse que le dimanche, où tout chôme et tout s’endort, où tout est mort dans la grande ville, comme le veut l’observance biblique.

Jetons les yeux autour de nous. Ce ne sont partout que boutiques aux montres voyantes, criardes, sans goût, où les prix sont inscrits en chiffres d’un pied de long. Des enseignes gigantesques appellent de tous côtés le passant ; quelques-unes, peintes sur des toiles transparentes portées sur des cordes, traversent la rue dans toute sa largeur, jetées au niveau des étages supérieurs d’une fenêtre à l’autre vis-à-vis. Dans ce quartier, qui naguère encore était la résidence favorite du monde élégant, tous les appartements sont occupés par des bureaux. C’est à peine si la famille du gardien, le janitor, qu’il ne faut pas confondre avec le concierge parisien, trouve pour se loger une place étroite dans les combles. Le rez-de-chaussée et le sous-sol sont dévolus aux magasins, aux dépôts de marchandises. Des élévateurs mettent les lourds colis en mouvement. On a recours le plus qu’on peut aux moyens mécaniques dans ce pays où la main-d’œuvre est si chère, et où le citoyen répugne à faire fonction de portefaix.

Nous voici dans Wall-street, le quartier de la finance. Cette rue, qui se détache de Broadway pour descendre vers la rivière de l’Est, est, avec deux ou trois autres parallèles ou transversales et plus courtes, le centre des affaires de banque. C’est comme Lombard-street à Londres et plus agité encore. Ce petit point de l’immense ville, à peine perceptible sur un plan à grande échelle, est celui où se signent et s’encaissent chaque jour des milliers de traites dont le monde entier connaît la signature et où se liquident, dans une chambre de compensation ou clearing-house, les transactions de la place pour une valeur de 170 milliards de francs chaque année. Soixante maisons de banque échangent là quotidiennement leur papier, et par des virements qu’amènent naturellement les relations d’affaires arrivent en quelque sorte à payer sans argent. Il a suffi en 1871 de débourser ainsi 5 milliards pour en payer 170, soit 1 pour 34. Cette ingénieuse invention du clearing a été empruntée à l’Angleterre, et ne date à New-York que de 1853 ; elle a peine à s’acclimater à Paris, qui est cependant une des premières places monétaires du globe.

C’est auprès de l’établissement du clearing-house, dans ce qu’on appelle gold-room ou la chambre de l’or et stock-exchange ou l’échange des valeurs, à proprement parler la Bourse, que se débattent chaque jour, de dix heures du matin à deux heures de l’après-midi, la prime de l’or, — depuis la guerre de sécession le papier-monnaie est la seule monnaie légale, — et le cours des divers titres financiers cotés, rentes publiques, actions ou obligations industrielles, de chemins de fer, de canaux, de mines. Ceux qui sont entrés à la Bourse de Londres ou de Paris, à l’heure ou elles fonctionnent, n’ont qu’une idée affaiblie du vacarme qui règne, vers midi, à la Bourse des valeurs de New-York. Si l’on ne savait ce qu’ils font, on prendrait tous ces hommes pour des fous ; on se demande comment ils arrivent à s’entendre.

Le stock-exchange occupe un bel édifice au coin de Wall-street. Renonçant à la simplicité d’autrefois que l’Angleterre n’a pas encore bannie, le banquier de New-York a lui-même des bureaux splendides. Elle a été démolie, la vieille maison qui l’abritait hier, lui et ses commis, pour faire place à un édifice à façade somptueuse, où se marie le marbre de Carrare au granit et au porphyre américains. A ces millionnaires improvisés, il faut des palais, même pour leurs opérations de banque. Le financier Fisk, aventurier effronté, qui tomba, il y a deux ans, sous la balle d’un rival en amour et en affaires, a donné l’un des premiers l’exemple de ces transformations. Jay Cooke l’avait imité, qui fit au mois de septembre 1873 cette faillite formidable qui en entraîna tant d’autres, si bien que le monde financier ne vit jamais panique pareille, et que la Bourse de New-York dut être fermée pendant dix jours pour que la crise pût s’apaiser, et cette crise dure encore ! D’autres grands financiers ont à leur tour suivi la mode et érigé un temple à la finance. A Londres, à Liverpool, ces rivales européennes de New-York, on vous fera encore asseoir devant une table de bois blanc, sur une chaise de paille, dans un bureau poudreux, obscur ; ici l’on vous offre un élégant fauteuil et même une chaise berceuse, un rocking-chair, dans une salle bien décorée, inondée de lumière, et dont les tables sont en bois sculpté.

On a voulu jouir de tous les conforts. Tandis que les agents de change vigilants marquent sur leur carnet, à la bourse de l’or ou des titres cotés, le taux oscillant des différentes valeurs, le banquier n’a point à se déranger pour en connaître les fluctuations. Un appareil télégraphique, installé dans un angle de ses bureaux et dont le bruit saccadé vous prévient dès l’abord comme le tic-tac d’un moulin, imprime d’une façon continue, sur une bande de papier qui se déroule, le cours de toutes les valeurs à l’instant précis où on le crie. Les nouvelles télégraphiques arrivées d’Europe ou de l’intérieur, le prix courant des principales marchandises, ne sont pas non plus oubliés, et chacun peut relever à son aise, sur cet appareil qu’on trouve dans tous les bureaux, l’indication qui l’intéresse. On a fait d’autres applications de la télégraphie électrique. Il y a par exemple dans quelques magasins un timbre qui sert à prévenir immédiatement la police dans le cas où l’on soupçonne un prétendu chaland ; l’agent de sûreté arrive et le pince en flagrant délit.

Aux allures de ces hommes sans cesse agités, il faut l’instantanéité de l’étincelle électrique. Le plus riche restaurateur de New-York, Delmonico, dix fois millionnaire, chez lequel tous les gens de Wall-street et des rues circonvoisines vont vers une heure prendre à la hâte, debout, un lunch et un drink, c’est-à-dire manger un morceau et se désaltérer, n’a pas manqué d’introduire dans son établissement le précieux télégraphe des valeurs. Il est là, dans le vestibule, où conduit un large escalier extérieur, couronné d’un fronton circulaire que portent des colonnettes de marbre. On dirait l’entrée coquette d’un petit temple grec ou romain ; c’est l’endroit où le Vatel de New-York gagne chaque jour 10 000 francs.

Pendant que l’appareil galvanique, à la marche intermittente, est consulté par quelques joueurs fiévreux, pénétrons dans la salle à manger. Une affiche prévient en entrant ceux qui mâchent du tabac de vouloir bien respecter les marbres. Tout le monde mange debout, le chapeau sur la tête. C’est à peine si quelques délicats assis occupent le coin étroit d’une petite table. Voici devant le comptoir étalés tous les plats qui peuvent séduire un client pressé : les sandwiches en piles énormes, les viandes froides en larges tranches, la salade de homard toute faite, hautement pimentée, la soupe aux huîtres où nagent de petites galettes, enfin mille pâtisseries feuilletées, rissolées, crémantes, que les affamés avalent d’une seule bouchée. C’est ensuite le tour dès boissons alcooliques, depuis le Champagne mousseux, que l’on boit à tout propos, jusqu’à l’ardent whisky, depuis l’innocent claret, le fin bordeaux venu de France, ou l’ale et le porter anglais et le lager ou bière allemande jusqu’au sherry couleur de topaze fabriqué autre part que dans les celliers de Xérès. Dans un saladier aux dimensions formidables s’étale un lac de vin aromatique. A côté, pour ceux en petit nombre qui ont fait vœu de tempérance, une cruche d’eau glacée. Des échansons attentifs versent les liqueurs à plein verre, ou vous passent avec confiance la bouteille, s’ils sont occupés à préparer pour d’autres ces breuvages composites chers à tous les Américains. La menthe poivrée, le zest d’orange ou de citron, s’y marient à la glace et à diverses liqueurs enivrantes. La règle veut qu’on boive cela avec un chalumeau. Le drink avalé, on prend en passant un havane, que l’on mâche plus qu’on ne le fume, et l’on court de nouveau aux affaires jusqu’à quatre heures. Nulle causerie, nul entrain, nul rire, ce serait pure perte de temps.

Laissons les banquiers, les négociants, les courtiers empressés retourner à leur office, et saluons encore, dans le quartier où nous sommes, les bourses du coton, des grains, des viandes salées, du pétrole, du tabac, où s’achètent et se vendent chaque jour pour une valeur de plusieurs millions de dollars de ces marchandises, puis reprenons la route de Broadway. Devant Wall-street se dresse l’église gothique de la Trinité, une des plus belles et des plus anciennes de New-York, aux tourelles élégantes, à la flèche élancée, haute d’environ 100 mètres, et du sommet de laquelle se déroule un panorama sans rival, toute la campagne environnante, qu’arrosent les eaux de l’Hudson. Édifiée par les Anglais peu de temps après qu’ils se furent emparés de la ville, cette église a été deux fois brûlée, deux fois reconstruite. Elle est entourée d’un ancien cimetière où sommeille sous le gazon et à l’ombre d’arbres séculaires plus d’un illustre mort. Gravé sur la pierre, on relève le nom d’Alexandre Hamilton, qu’Aaron Burr tua dans un duel, et, en entrant dans la nef, celui du brave capitaine Lawrence, qui, frappé à mort sur le vaisseau qu’il commandait, ne dit à ses hommes que ces mots : « Ne rendez pas le navire ! » Les jeunes boys de New-York savent tous son histoire par cœur.

Tout auprès de Trinity-Church, à droite, à gauche, en face, comme si les choses de la terre devaient côtoyer les choses divines, une nouvelle série de gigantesques édifices, de banques de toute nature et de toute nationalité, des bureaux de change, de chemins de fer, de bateaux à vapeur, d’entreprises de tout genre, de messagerie, de commission, de dépôts. N’oublions pas les safe-deposits, où, moyennant une redevance mensuelle légère, variable suivant les cas, des compagnies autorisées, incorporées, vous louent un coffre, une sorte de tiroir d’acier numéroté, noyé dans un mur de granit souterrain. Vous y déposez, vous y cachez vous-même les valeurs, les objets précieux que vous voulez assurer contre toute chance de perte, de vol, d’incendie : titres de bourse, argenterie, bijoux, diamants, papiers d’affaire ou de famille. La compagnie vous donne votre clé, une merveille de serrurerie impossible à reproduire sans le modèle, et vous venez, quand il vous plaît, inspecter votre cassette. Vous l’emportez pour cela dans un box ou bureau fermé, où nul ne vous voit, vous détachez seul vos coupons, prenez vos notes. On ne vous donne aucun reçu de vos dépôts, on n’en répond point, mais une garde attentive veille nuit et jour autour et au dedans du monument, nul voleur n’a encore tenté d’envahir cette forteresse, et toutes les précautions sont prises contre l’incendie, si jamais il s’attaquait à ces caves de granit et d’acier. On dit que l’idée de ces compagnies de dépôt de sûreté vient d’Angleterre ; elles n’existaient pas en effet à New-York il y a quelques années. Aujourd’hui on les rencontre dans Broadway au nombre d’une douzaine, et toutes distribuent de gros dividendes à leurs actionnaires. Les banquiers de Paris, quand on leur parle de ces choses, répondent que les mœurs, les idées françaises y sont rétives ; ils devraient cependant en faire l’essai.

Un peu plus loin que l’église de la Trinité est un vaste édifice tout en granit, presque achevé, et dont le style, où la puissance s’unit à la sobriété, fait honneur à l’école architecturale américaine. C’est là que la poste et la douane s’installeront définitivement demain. Une des immenses façades donne sur un square, planté d’arbres, où est aussi l’hôtel de ville ou City-Hall, qu’elle écrase. Au voisinage de ce square, qui a vu se dérouler les diverses péripéties de plus d’un soulèvement populaire, se profilent les magnifiques bureaux des plus grands journaux de New-York. La façade somptueuse de quelques-uns de ces édifices privés fait pâlir celle des édifices publics. C’est là que sont le Herald, le Times, la Tribune, le Staats-Zetiung, ce dernier allemand. Certaines de ces feuilles se tirent à plus de cent mille exemplaires chaque jour, et contiennent quelquefois seize pages de texte et d’annonces en caractère très serré. Le prix en est modique, 3 ou 4 cents par exemplaire, — le cent est égal à l’un de nos sous. Le Times de Londres est dépassé par le Times et le Herald de New-York, La machine automatique qui imprime ce dernier, et qui fait seule toute la besogne, est la plus rapide, la plus puissante, la plus ingénieuse qui se puisse voir.

On sait que la presse américaine tient à honneur d’être toujours en éveil, sur la brèche, aux aguets. Elle a jeté partout, sur l’un et l’autre hémisphère, le bataillon de ses enfants perdus, ces irréguliers qu’on nomme les reporters. Ils ont mission de tout relater, et rien de nouveau ne leur échappe. Quelques-uns sont des observateurs du premier mérite. On ne recule devant aucune avance d’argent, et l’on fait d’énormes bénéfices. On a devancé quelquefois les gouvernements eux-mêmes dans la connaissance des nouvelles politiques. C’est le Herald qui, lors de la guerre d’Ethiopie, a fait passer aux Anglais le télégramme annonçant la prise de Magdala ; c’est lui, c’est un de ses reporters, depuis lors justement célèbre, M. Stanley, qui a découvert Livingstone, perdu depuis des années autour des grands lacs de l’Afrique centrale.

 

L. Simonin

Extrait de : New York et la société américaine – Souvenirs de voyage

Revue des Deux Mondes T. 6, 1874

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